ohneGift et 4aqua s’engagent pour:
– Rejet de la révision de la LAgr
– sélection ciblée de pesticides à faible risque provenant de pays de l’UE pour protéger notre eau
– Promouvoir une agriculture résiliente face aux organismes nuisibles
La Suisse va-t-elle bientôt devoir reprendre les autorisations de produits phytosanitaires de 20 pays de l’UE ?
Sous le titre prometteur « Une protection des plantes moderne, c’est possible », une révision de la LAgr devrait permettre d’autoriser de manière « simplifiée » les produits phytosanitaires provenant des pays voisins (F, D, AT, I), de Belgique et des Pays-Bas. Cette procédure simplifiée s’accompagnerait volontairement et inévitablement d’une dégradation de l’évaluation sanitaire et environnementale. Comme les « autorisations zonales » de toute l’Europe centrale et méridionale sont encore reconnues dans les pays cités, les produits phytosanitaires de 20 pays de l’UE pourraient être vendus en Suisse par le biais de cette révision de la LAgr.
Par conséquent, la Suisse risque d’être bientôt le pays européen qui autorise le plus de pesticides. À l’avenir, les denrées alimentaires et l’eau potable suisses pourraient contenir le cocktail de pesticides le plus complexe d’Europe.
Revue à la baisse – Est-ce que les normes sanitaires et environnementales les plus basses s’imposent désormais en Suisse ?
Rien que dans les pays voisins de la Suisse, environ 50 substances actives problématiques et des centaines de produits phytosanitaires basés sur ces substances sont autorisés. 10 d’entre elles sont même considérées comme très problématiques. On ignore encore quelles autres autorisations, y compris zonales, viendront s’ajouter depuis les Pays-Bas et la Belgique.
Grâce au mécanisme d’autorisation par zone, les distributeurs de pesticides en Suisse pourraient à l’avenir choisir d’annoncer les autorisations de produits phytosanitaires de 20 pays de l’UE. Et ils choisiraient naturellement ceux qui comportent le moins de contraintes en matière de protection de l’environnement et de la santé. Car c’est ainsi qu’ils pourraient vendre le plus de pesticides. Le niveau de protection de la santé et de l’environnement en Suisse serait alors constamment revu à la baisse.
La critique de la procédure d’autorisation par zone n’est pourtant pas nouvelle. L’agence fédérale allemande de l’environnement écrit par exemple:
« La procédure d’autorisation par zone comporte le risque d’abaisser toujours plus les normes de protection. En divisant les pays de l’UE en zones, on suppose que les pays d’une même zone ont des conditions climatiques, écologiques et agricoles très similaires. Cela n’est que partiellement vrai, en particulier pour la zone centrale, dont fait partie l’Allemagne ».
Comme la Suisse ne devrait pas reprendre les autorisations d’une seule zone de l’UE comme les autres pays de l’UE, mais de deux (centre et sud), la problématique deviendrait même cumulative.
L’évaluation sanitaire et environnementale des produits phytosanitaires ne doit pas être déléguée à l’étranger.
La révision de la LAgr prévoit en outre une limitation de la durée de la procédure d’homologation des produits phytosanitaires. Ce qui est aujourd’hui examiné dans un délai de 3 à 6 ans devrait désormais l’être en 12 mois. Pour cette raison également, les contrôles ne seraient plus possibles que de manière superficielle. Les nombreuses pollutions des eaux souterraines et de l’eau potable (par ex. par des produits de dégradation du chloridazon, du chlorothalonil, du S-métolachlore) montrent que l’examen n’est déjà pas effectué avec suffisamment de soin jusqu’à présent.
L’exemple récent de la pollution des sols, de l’eau et des denrées alimentaires par des composés alkylés per- et polyfluorés (PFAS) et des coûts consécutifs se chiffrant en milliards montre à quel point il est important mais aussi difficile d’identifier les risques à temps.
En revanche, avec la procédure d’autorisation simplifiée, la Suisse devrait faire confiance aux autorités des pays d’où sont reprises les autorisations de produits phytosanitaires quant à la qualité de l’examen dont ils procèdent.
La Suisse déléguerait ainsi la responsabilité de notre santé et de nos eaux à des autorités à l’étranger.
Par contre, si des dégâts survenus en Suisse engendrent des coûts à la suite d’un examen peu rigoureux effectué à l’étranger, il reviendra à la Suisse de supporter ces coûts et non aux auteurs de l’examen.
Inversion du fardeau de la preuve
A cela s’ajoute le fait que l’admission automatique des substances actives signifie que la Suisse devrait fournir une preuve particulière pour justifier une non-autorisation (art. 160a, al. 3, nLAgr). Aujourd’hui, c’est le demandeur (p. ex. les distributeurs de pesticides) qui doit apporter cette preuve. En d’autres termes, on assiste à un dangereux renversement du fardeau de la preuve au détriment de l’autorité d’homologation. Cette réglementation place l’autorité d’homologation sur la défensive et la mise en œuvre du principe de précaution (art. 1, al. 2, LPE) est contournée.
Pourquoi la révision ne résout pas les problèmes existants et qu’est-ce qu’une véritable « protection phytosanitaire moderne »
Aucune analyse de la situation actuelle n’a été effectuée pour la révision demandée de la loi sur l’agriculture. La révision n’est justifiée que par le fait que les procédures d’autorisation actuelles seraient trop longues.
C’est pourquoi l’agriculture manquerait de moyens efficaces pour lutter contre les organismes nuisibles. En effet, environ 700 demandes d’autorisation pour des produits phytosanitaires sont actuellement en attente.
Le dossier de consultation ne contient aucune information sur les raisons de cette situation (par exemple, le refus du Parlement d’augmenter le personnel des autorités d’homologation). Il n’a pas non plus été précisé pour quels types de cultures l’agriculture est tributaire de produits phytosanitaires supplémentaires et quelles sont les conséquences pour la santé et l’environnement si ces produits sont utilisés à grande échelle.
L’analyse d’impact de la réglementation (AIR) nécessaire pour les nouvelles normes juridiques fait donc également défaut. Celle-ci comprend notamment « les effets sur l’environnement et la société (ch. 3.1) »[1].
L’association SansPoison s’oppose fermement à cette révision de la LAgr. La procédure prévue par la révision n’a rien à voir avec une « protection moderne des plantes » et ne répond pas aux besoins de la population suisse, car elle met en danger la santé des personnes, la qualité de l’eau potable et la biodiversité.
L’association SansPoison s’engage pour que l’OSAV, en collaboration avec l’OFEV, l’OFAG, le SECO et les milieux intéressés (environnement, agriculture), sélectionne de manière ciblée les produits phytosanitaires à faible risque dans la palette des pesticides européens qui ne sont jusqu’à présent pas autorisés en Suisse. Une telle démarche est préférable à une procédure d’autorisation simplifiée, dans laquelle les autorisations de pesticides sont délivrées à la va-vite.
Il est en outre important que la Confédération et les cantons encouragent une agriculture qui soit résiliente face aux organismes nuisibles et qui n’ait pas besoin de produits phytosanitaires nocifs.
Veux-tu aussi donner ta voix à l’eau ?
Envoie dès maintenant le modèle de réponse à la consultation pour la LAgr de 4aqua. Instructions et téléchargement ici (seulement en allemand).
[1] Directives du Conseil fédéral concernant l’analyse d’impact de la réglementation relative aux projets législatifs de la Confédération (Directives de l’AIR, voir: https://www.seco.admin.ch/seco/de/home/wirtschaftslage—wirtschaftspolitik/wirtschaftspolitik/regulierung/regulierungsfolgenabschaetzung.html