L’autre facette des isolation de façades

Blocages routiers, transition énergétique, loi sur la protection du climat : ces expressions dominent actuellement les gros titres. Fongicides, algicides, toxicité aquatique : on lit rarement ces termes. Mais nous vous montrons dans notre nouvel article comment ils sont tous liés.
août 1, 2023
Georg Odermatt

Le mouvement Renovate Switzerland demande que la Suisse investisse davantage d’argent dans l’assainissement thermique des bâtiments[1] car ceux-ci sont responsables d’environ 40 % des émissions de CO2 de la Suisse, principalement en raison de chauffage[2]. Or de nombreux bâtiments ont été construits avant 1980 et ne sont pas suffisamment isolés. 1,5 millions de maisons en Suisse ont besoin d’être assainies[3]. L’assainissement de l’enveloppe des bâtiments permettrait de réduire massivement la consommation d’énergie[4]. En outre, l’installation d’un chauffage respectueux du climat n’a que peu de sens sans assainissement énergétique de l’ensemble du bâtiment. La nouvelle loi sur la protection du climat contient pour ce faire des conditions cadres[5]. C’est juste et important.

Pas de problème et pourtant problématique : l’attaque des façades par des champignons et des algues

Un effet secondaire de l’assainissement de l’enveloppe du bâtiment peut être une sensibilité accrue aux moisissures et à la prolifération d’algues. En effet avec l’isolation, la face extérieure de la façade reste d’une part plus fraîche et d’autre part plus longtemps humide en raison de la condensation nocturne. Ces deux facteurs favorisent la croissance des champignons et des algues qui sont en principe très tolérants (sauf à la lumière directe du soleil) aux influences de l’environnement. Les façades de maison bien isolées n’emmagasinent pas la chaleur du soleil et ne laissent pas passer la chaleur de l’intérieur. C’est pourquoi elles restent humides plus longtemps que d’autres façades, et offrent ainsi un terrain idéal aux algues et aux champignons. Le manque d’auvent est aussi une cause importante. Ainsi, la pluie peut mouiller les façades même sans vent pour la pousser, et favoriser la croissance des algues et des champignons. Lors de votre prochaine promenade, soyez attentifs aux façades sans toit : une coloration noire-verdâtre trahit une infestation.

Du point de vue de la construction, l’attaque des façades par des champignons et des algues est généralement inoffensive[6] une « évolution » esthétique et biologique avec laquelle on pourrait vivre et économiser de l’argent. L’infestation ne devient un problème que par la réaction des propriétaires qui veulent conserver l’aspect original d’une façade immaculée. Quelles que soient les raisons: pour plaire aux voisins, pour préserver leur statut social, pour louer leur maison plus cher, ou tout simplement parce qu’on a toujours fait comme ça.

Les champignons et les algues sur les façades sont trop souvent traités avec des biocides (généralement des fongicides et des algicides). Ceux-ci sont directement mélangés aux peintures de façade (peinture, vernis) ou aux enduits et appliqués sur l’enveloppe extérieure du bâtiment. Bien qu’ils soient difficilement solubles dans l’eau (quelques milligrammes par litre), ils sont dissous par l’écoulement de l’eau de pluie en l’espace de quelques années et de retrouvent sur le sol et dans les eaux[7]. Là aussi ils tuent malheureusement les champignons, les algues et les bactéries. Dans les eaux, les champignons, les algues et les bactéries remplissent des fonctions importantes: les champignons aquatiques agissent comme des destructeurs et libèrent des nutriments pour les autres organismes aquatiques. Les algues servent de nourriture aux animaux aquatiques. Les bactéries forment un microbiome vital comme dans l’intestin de l’homme. Nous avons déjà abordé les effets des biocides dans l’environnement et surtout de leurs produits de dégradation dans plusieurs articles, par exemple dans «Biocides: interdits en agriculture, autorisés pour les amateurs»[8]

Que faire?

Pour atteindre l’objectif de neutralité climatique de la Suisse d’ici 2050, il faut un taux d’assainissement annuel de 2 % à 3 % dans le secteur du bâtiment (actuellement, ce taux stagne à environ 1 %)[9]. Cela signifie que l’utilisation de biocides et la concentration de ces substances dans l’environnement vont également augmenter si rien ne change dans la pratique actuelle. C’est en outre problématique que ces peintures et vernis pour façades ne comportent souvent pas d’indications de danger ou que leurs composants soient insuffisamment déclarés.

Mais quelles sont les substances actives utilisées pour les façades?

La liste des substances actives est longue mais on remarque entre autres les substances carbendazime et terbutryne. La carbendazime est utilisée comme fongicide dans les façades et est classée comme toxique pour les humains et les animaux[10].[10] La terbutryne est un herbicide et est considérée comme fortement toxique pour l’eau[11].[11] Des études menées par l’Eawag montrent que les concentrations de biocides présentaient des valeurs critiques à de nombreux points de mesure en ville[12].[12]

Et que fait la politique?

En 2019, une interpellation a été déposée au Conseil national par Isabelle Chevalley (Les Verts Libéraux) sur l’utilisation de biocides dans les peintures[13].[13] Le Conseil fédéral y a répondu. Mais cela n’a rien changé dans la pratique. On estime que 10 à 30 tonnes de biocides sont actuellement utilisées chaque année en Suisse pour l’enveloppe des bâtiments, avec une tendance à la hausse. Or il suffit de concentrations de quelques microgrammes par litre pour qu’ils endommagent l’écosystème de tronçons entiers de ruisseaux.

L’association sansPoison soutient la protection du climat. Mais sa mise en œuvre ne doit pas se faire au détriment de la biodiversité. C’est pourquoi l’association sansPoison demande que les biocides nuisibles à l’eau et autres biocides toxiques soient interdits simplement et rapidement dans les revêtements de façade. Avec le temps, les gens s’habitueront à l’idée que les façades ne doivent pas être immaculées et sauront que l’environnement est ainsi protégé.

Sources:

[1] https://renovate-switzerland.ch/de/die-kampagne/die-forderung/

[2] https://www.dasgebaeudeprogramm.ch/de/das-gebaudeprogramm/ziele/

[3] https://www.nzz.ch/finanzen/hausrenovation-mit-diesen-kosten-muessen-sie-rechnen-ld.1733986?reduced=true

[4] https://www.energie-experten.ch/de/wohnen/detail/energieverbrauch-zum-heizen-halbieren.html

[5] https://www.fedlex.admin.ch/eli/fga/2022/2403/de

[6] https://www.stuckateur.de/wp-content/uploads/2016/09/06_Sind-Algen-und-Pilze-an-Fassaden-immer-ein-Mangel_Beyen_24-11-2016.pdf ;

[7] https://www.google.com/url?sa=i&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=&ved=0CAIQw7AJahcKEwiImub1r73_AhUAAAAAHQAAAAAQAw&url=https%3A%2F%2Fwww.chemsuisse.ch%2Ffiles%2F78%2FDE-Diverse-Merkblaetter%2F551%2FMerkblatt-D13.pdf&psig=AOvVaw0i-MVt2d8uvO21_mWhH_sG&ust=1686647019363620

[8] https://ohnegift.ch/2023/06/04/elementor-2753/

[9] https://www.4-b.ch/de/blog/energetisch-sanieren-gemaess-neuester-studie-der-empa/

[10] https://www.jstor.org/stable/43382796

[11] https://circabc.europa.eu/sd/a/6a543374-01c4-4002-a7b5-f6fbd2794c41/Terbutryn%20EQS%20dossier%202011.pdf

[12] https://www.eawag.ch/fileadmin/Domain1/Beratung/Beratung_Wissenstransfer/Publ_Praxis/Faktenblaetter/fb_Biozide_in_Gewaessern_Nov2008.pdf

[13] ttps://www.parlament.ch/de/ratsbetrieb/amtliches-bulletin/amtliches-bulletin-die-verhandlungen?SubjectId=48319

Alternativen gegen Pilze und Algen an der Hauswand?

Wer seine Hausfassade trotzdem frei von Algen und Pilzflecken halten will, sollte auf Alternativen ausweichen, welche die Umwelt nicht belasten. Hierzu einige Tipps:

Alkalische Silikatanstriche oder Kalkputze haben einen so hohen pH-Wert, dass Algen und Pilze darauf nicht oder nur sehr schwer gedeihen können. Einige Hersteller bieten Fassadenfarben ausdrücklich ohne Biozide an. Eine weitere Möglichkeit ist eine dunkle Fassadenfarbe: Dann fallen Flecken weniger auf, denn wie erwähnt sind Pilze und Algen nur ein optisches Manko.[1] Und falls es zu einem Befall kommt, kann dieser von Spezialisten mit einem Hochdruckreiniger entfernt werden. Im Übrigen hilft vor allem, die Fassade möglichst trocken zu halten, etwa durch ein gutes Überdach.[2]

Als eher problematisch beurteilen wir Fassaden mit Nanomaterialien, wie sie teils angeboten werden, weil diese wiederum in die Umwelt gelangen und dort unerwünschte Folgen haben können.

[1] https://www.ibau.de/akademie/wissenswertes/biozide-in-fassadenfarbe-stellen-umweltrisiko-dar/

[2] https://www.bafu.admin.ch/bafu/de/home/themen/chemikalien/fachinformationen/sorgfaeltiger-umgang-mit-biozidprodukten/materialschutz/verputzte-fassaden.html

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